Face à face


J’ai été ces sternes, assises en rond sur les piquets

Comme les aiguilles d’une horloge réclamant la trêve

La nature sans parler ici traduit chacun de mes rêves

L’étang à chaque inspiration ne demande qu’à inspirer.

Paix et tendresse.

*

J’ai été ce ciel gris à l’infini. Arqué en voûte

Sur le miroir du lac, il cherche son visage en tremblant.

Le lac par la brume ne lui renvoie que le doute

Et le ciel pour chasser le trouble pleut doucement.

Paix et justesse.

*

J’ai été ces pins humides et nus face au vent

Qui cherche dans leurs bras à chasser la poussière

Mon dieu ces arbres, comme ils doivent être verts

Sous les bonheurs enfuis et les pleurs retenus.

Paix et tristesse.

*

Je t’ai trouvé Somme, sans question ni réponse,

J’attendais le miroir, j’ai rencontré un reflet

Nulle vérité sous le sourire des ronces

Seuls le soupir des joncs

Et l’invitation à pleurer.

Le camp des sens


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 Photo : Belsem Guechai : The birth of the sun – Tous droits réservés

 

Soleil coupé, l’horizon pour moitié

L’œil qui éclot peint une robe

La nuit s’enfouit sous le pigment des promesses

~

Une flaque prend feu entre les grèves

Ultime contraste : les rochers dans l’ombre

La fluide illusion qu’ils retiennent

~

Poésie ainsi née d’écarts.

L’envers du décor


 

Poète, détourne ton regard !

A la ville enlève les ailes 

Reste la vie.

Te voilà Paris, bête sauvage ! Tourne donc un peu vers moi ton masque de chaos ! Laisse-moi voir le miasme des heures se délaver sur ta mine ! Gris de pluie, aquarelle d’à-quoi-bon, mascara des lendemains d’ivresse ! Derrière la poussière crochetée sur ma lucarne, les colonnes de la Défense se dressent, insensés phares sans lumière. Mais il est tard Paris, ô bête sauvage, bien trop tard pour me mentir.

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Enfin, hier, je t’ai apprivoisé, -ou bien était-ce toi ?- Dans la jungle de métal aux mille échos vides, je cherchais l’oubli dans les nuages, évanouis sitôt accouchés par le bitume, et la Seine s’est offerte à moi, nue dans un bleu rival du rêve, s’enroulant sans fin dans les ronronnements du soleil -ou bien était-ce moi ?- Des deux rives j’ai choisi celle qui faisait face à l’ombre de l’autre et j’ai plongé, à plume le corps, dans l’envers de tes charmes artificiels.

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Salut Paris ! Ô bête sauvage, il est trop tard pour mentir !

 

Ainsi l’art m’y fit sienne.